La question de l’allure d’entraînement et de course constitue l’une des principales préoccupations des coureurs à pied.
- Courir trop rapidement expose au risque de blessure ou d’abandon en course.
- Courir trop lentement limite la progression et fait perdre du temps.
La difficulté réside dans le fait que chaque coureur présente des capacités différentes. Une allure confortable pour l’un sera épuisante pour l’autre. Il est donc essentiel de déterminer ses propres zones d’intensité, adaptées à son niveau actuel.
Ce dossier Protéalpes présente quatre méthodes et outils pour calculer ses allures cibles, du test terrain accessible à tous jusqu’à l’analyse en laboratoire pour les plus exigeants. Il détaille également quelle méthode choisir selon son profil et ses objectifs, pour passer de l’approximation à la précision.

Quelle méthode choisir selon son profil ?
Avant de détailler les différentes approches, voici un guide simple pour s’orienter vers la méthode la plus adaptée à sa situation.

Méthode 1 : le test basique sur 5 km
Des règles empiriques permettent d’estimer vos performances sur différentes distances à partir d’un temps de référence.
- Les tableaux VDOT de Jack Daniels, qui donnent pour un même niveau de performance des temps cohérents du 5 km au marathon.
- La formule de Riegel T2=T1×(D2/D1)1,06, validée expérimentalement comme assez fiable du 1 mile au semi, et raisonnable jusqu’au marathon avec plus d’erreur.
Pour se tester, réalisez un 5 km à fond pour mesurer votre niveau actuel. L’allure en course sur cette distance sert de référence pour calculer les allures cibles sur certaines distances.
Comparaison des méthodes de prédiction
Tableaux VDOT (Jack Daniels) vs Formule de Riegel
10 km
Semi-marathon (21,097 km)
Marathon (42,195 km)
Exemple concret
Test réalisé : 5 km en 25’00 (allure 5’00/km).
- Allure 10 km estimée : 5’10–5’15/km → environ 51’30–52’30
- Allure semi-marathon estimée : 5’25–5’30/km → environ 1h54–1h56
- Allure marathon estimée : 6’00–6’05/km → environ 4h13–4h17
Règle pratique à partir d’un 5 km
Pour un coureur typique correctement entraîné sur l’endurance :
- Allure 10 km ≈ allure 5 km + 10 à 15 s/km
- Allure semi-marathon ≈ allure 5 km + 25 à 35 s/km
- Allure marathon ≈ allure 5 km + 55 à 70 s/km
| Points forts de cette méthode | Limites |
|---|---|
| Simple, accessible et gratuite. Elle ne nécessite ni équipement spécifique ni connaissances techniques avancées. Elle constitue un excellent point de départ pour tout coureur souhaitant structurer ses objectifs. | Les formules donnent une estimation théorique qui suppose un entraînement adapté. Sans travail préalable sur l’endurance ou le volume nécessaire, la performance réelle sur longue distance sera inférieure aux prévisions. |
Attention, cette méthode a le mérite d’être très simple, elle permet de facilement définir des objectifs de performance sur des épreuves et de s’en inspirer pour adapter les entraînements. Mais elle ne permet finalement pas de fixer des seuils précis sur ces entraînements, ce que les méthodes suivantes vont rendre possible.
Méthode 2 : indirectement, via la fréquence cardiaque max
C’est l’une des méthodes les plus fréquentes pour calculer des allures pour des entraînements.
Elle consiste à mesurer votre fréquence cardiaque maximale (FCM) via un test d’effort progressif ou à l’estimer par la formule 220 – âge, bien que cette dernière présente une marge d’erreur de ±10-15 battements.
Pour les zones d’entraînement, référez-vous au pourcentage de FCM : endurance fondamentale (60-70% FCM), seuil aérobie (70-80% FCM), et seuil anaérobie (80-90% FCM).
Une alternative plus précise utilise la fréquence cardiaque de réserve (FCR) : FCR = FCM – FC repos, puis calculez la zone cible avec la formule de Karvonen (FC cible = FC de repos + % d’intensité × (FCM − FC de repos).)
Les formules FCM / Karvonen ne donnent pas à elles seules une allure cible précise pour un 10 km, un semi ou un marathon comme le font les calculateurs de type VDOT ou Riegel.
Une fois ces zones définies, on peut, par l’expérience et/ou des tests, associer à chaque zone une fourchette d’allure approximative (par exemple : endurance fondamentale à 65% FCM correspond à 6’00–6’15/km sur terrain plat).
Mesurez votre FC au repos le matin au réveil
Zones de fréquence cardiaque cible
Méthode FCM vs Formule de Karvonen (FCR)
| Zone d’entraînement | Méthode FCM (%) | Formule de Karvonen (FCR) |
|---|---|---|
| Endurance fondamentale (60-70% FCM) | – – | – – |
| Seuil aérobie (70-80% FCM) | – – | – – |
| Seuil anaérobie (80-90% FCM) | – – | – – |
Visualisation des zones
| Points forts de cette méthode | Limites |
|---|---|
| Elle permet de gérer l’intensité en temps réel, particulièrement utile pour éviter de courir trop vite lors des sorties faciles. Elle s’adapte également aux conditions extérieures (chaleur, fatigue, dénivelé). | La fréquence cardiaque peut être influencée par de nombreux facteurs (stress, déshydratation, température). Elle ne remplace pas un test de performance pour établir des objectifs chronos précis sur des courses. |
Méthode 3 : le test de VMA
Pour les coureurs expérimentés, le test VMA (vitesse maximale aérobie) sur piste permet d’établir des allures spécifiques : endurance à 65-75% VMA, seuil à 85-90% VMA, fractionné à 95-105% VMA.
Formule basée sur % VMA :
- Endurance fondamentale : 65-75% VMA
- Endurance active : 75-85% VMA
- Seuil anaérobie : 85-90% VMA
- VMA courte : 95-100% VMA
Exemple pour VMA = 15 km/h :
- 70% VMA = 10,5 km/h = allure 5’43/km
- 80% VMA = 12 km/h = allure 5’00/km
- 90% VMA = 13,5 km/h = allure 4’26/km
Déterminée via un test VMA sur piste
| Points forts de cette méthode | Limites |
|---|---|
| C’est l’outil de référence pour structurer un entraînement fractionné et progresser en vitesse. Elle est largement utilisée par les entraîneurs et les coureurs confirmés. | La VMA mesure la capacité aérobie maximale, mais ne prédit pas directement la performance sur marathon. Un coureur avec une VMA élevée mais peu d’endurance ne tiendra pas son rythme sur 42 km. |
Méthode 4 : analyse en laboratoire
L’analyse de votre seuil lactique via des tests en laboratoire offre la précision optimale pour individualiser vos zones d’entraînement.
Concrètement, le test se déroule le plus souvent sur tapis de course (ou parfois sur piste) avec un protocole par paliers progressifs : la vitesse est augmentée toutes les 3 à 5 minutes, tandis qu’une petite goutte de sang est prélevée au doigt ou au lobe de l’oreille à la fin de chaque palier pour mesurer la concentration de lactate.
En traçant la courbe « vitesse de course / lactate sanguin », le spécialiste identifie vos principaux seuils physiologiques :
- le premier seuil (aérobie), où le lactate commence à s’élever mais reste bien maîtrisé ;
- le second seuil (anaérobie), au-delà duquel le lactate augmente rapidement et l’effort devient difficilement soutenable longtemps.
À partir de ces données, le laboratoire fournit généralement :
- des allures précises (ou puissances) pour chaque zone : endurance fondamentale, tempo, seuil, travail intensif ;
- des plages de fréquence cardiaque correspondantes, ce qui permet ensuite d’utiliser simplement votre montre cardio sur le terrain.
| Points forts de cette méthode | Limites |
|---|---|
| Objectivité maximale et personnalisation poussée. En répétant le test tous les 6 à 12 mois, il devient possible de suivre sa progression avec précision et d’ajuster ses zones en fonction des adaptations physiologiques. | Coût élevé (généralement entre 80 et 150 €), accès limité (laboratoires ou centres spécialisés), et résultat ponctuel. Cette méthode est surtout pertinente pour les coureurs engagés dans un entraînement intensif ou ceux préparant un objectif chrono ambitieux. |
Conclusion
Les calculateurs et tests présentés dans cet article constituent des outils intéressants pour structurer ses entraînements et définir ses objectifs. Mais il convient de garder à l’esprit qu’aucune formule ne remplace l’expérience du terrain.
La capacité à tenir une allure dépend de nombreux facteurs : l’historique d’entraînement, la gestion de l’effort, les conditions météo, le profil du parcours, l’état de fraîcheur le jour J. Les formules donnent une base solide, mais c’est en testant progressivement ses allures cibles lors de sorties spécifiques que l’on affine son ressenti et sa confiance.
- Commencer simple : un test 5 ou 10 km suffit amplement pour débuter et obtenir des repères fiables.
- Ajuster progressivement : tester ses allures cibles sur des sorties d’entraînement avant de les appliquer en course.
- Écouter son corps : si une allure semble trop difficile malgré les calculs, l’adapter. Il vaut mieux courir légèrement en dessous de ses capacités théoriques que de partir trop vite et exploser.
- Suivre sa progression : refaire un test tous les 2 à 3 mois pour ajuster ses zones en fonction de ses progrès.
En combinant ces outils avec une approche réaliste et progressive, il devient possible de maximiser ses chances d’atteindre ses objectifs tout en prenant du plaisir sur ses courses et entraînements.





