Notre avis sur la whey dite native

Impossible de faire des recherches sur la whey sans entendre parler de whey protéine dite « native ». Ce terme, qui a émergé il y a quelques années au sein des entreprises laitières de production de protéines, a rapidement été repris comme argument marketing de vente.

Que se cache-t-il concrètement derrière ce terme ? Les protéines natives, souvent vendues à des prix plus importants, sont-elles véritablement plus qualitatives que les wheys « classiques » pour optimiser les résultats de vos entraînements, en fitness, musculation et sports d’endurance ? 

C’est ce que nous avons souhaité éclaircir ici, le plus objectivement et simplement possible.

La whey « classique » Vs whey dite « native », quelle différence concrètement ?

En France ou ailleurs, ce qui distingue une whey « classique », appelée également whey « fromagère », d’une whey dite « native » est son procédé d’isolation protéique.

Ce terme est différent des appellations classiques isolat (isolate), concentrée (concentrate) et hydrolysée (hydrolysat) qui font référence au niveau de filtration des poudres.

Globalement, le lait contient deux grandes sortes de protéines, les caséines et les protéines de lactosérum (lactoglobulines). Les protéines de lactosérum sont les plus intéressantes d’un point de vue nutritionnel et sont celles qui composent les whey. D’ailleurs, « whey » signifie « lactosérum » en anglais. 

–       Pour une whey classique : lors de la fabrication du fromage, on fait coaguler la caséine sur le lait entier, avec de la présure, ou par acidification. La caséine est dénaturée et va coaguler. Les protéines de petit lait, quant à elles, ne seront PAS dénaturées, et c’est pour cela qu’elles restent en solution dans la phase aqueuse du lait. C’est ce que l’on appelle le petit lait, ce liquide que l’on retrouve au-dessus des yaourts par exemple.

Grâce à une pression mécanique sur la caséine, on sépare ce précieux petit lait, que l’on peut récupérer. 

Suivant les méthodes, le liquide est ensuite stérilisé, parfois pasteurisé, avant d’être Ultrafiltré/Microfiltré pour en isoler les protéines (naturellement riches en BCAA) et retirer le lactose, les graisses… 

Il s’en suit une déshydratation, afin d’obtenir une poudre sèche, plus ou moins riche en protéines, en BCAA, et pauvre en glucides.

–       Pour une whey dite « native » : la filtration des protéines est similaire, mais a lieu directement sur lait entier. La seule et unique différence est le fait qu’il n’y a pas de séparation préalable de la caséine. Les autres procédés sont, quant à eux, identiques. 

Différence d’efficacité ?

graham mansfield y7ywDXWJ JU unsplash

Pour commencer, voici une question importante : au-delà des prétendus avantages avancés par les fabricants de whey « native », y-a-t-il véritablement une différence avec les whey classiques ? Eh bien non… Absolument aucune différence en termes d’efficacité sur les performances sportives ou sur la prise de masse musculaire n’a jamais été démontrée. 

Même si une étude a montré que la whey native augmentait plus rapidement la concentration d’acides aminés dans le sang que la whey protéine classique (en tout cas avec celle utilisée dans l’étude), elle n’était pas supérieure et n’augmentait pas la synthèse de protéines musculaires. De plus, cette augmentation de concentration en acides aminés est totalement dépendante de la qualité des wheys utilisées, de leurs ingrédients et ne saurait être représentative de toutes les wheys natives, ou de toutes les wheys classiques.

Whey native = whey non dénaturée ?

L’un des gros arguments annoncés par les fabricants de native, est d’affirmer que la whey native est non dénaturée, alors qu’une whey classique l’est. 

Il est important de cadrer le terme de « dénaturation » et de comprendre qu’une whey dénaturée ne veut en réalité rien dire précisément.

Globalement, une protéine dénaturée est une protéine qui a perdu sa forme initiale, sa structure originelle. A part dans les produits crus, nous mangeons des protéines dénaturées depuis les débuts de l’histoire de l’humanité, avec notamment la cuisson de notre alimentation. Lorsqu’on chauffe, on dénature. Pour autant, peut-on dire qu’un poulet cru est plus naturel, plus nutritif qu’un poulet rôti ? Heureusement non. 

La dénaturation des protéines est un gros sujet pour les industriels pharmaceutiques. En effet, dans le cas d’une protéine thérapeutique comme l’insuline par exemple, de son repliement est dépendante toute la cascade de signalisation métabolique. Ainsi, la dénaturation provoquerait une inefficacité du traitement et un danger direct pour le patient. 

Il est important de comprendre qu’une protéine de nutrition (protéine de whey) n’est pas une protéine thérapeutique, qui doit avoir une forme, un repliement bien particulier pour aller exercer son action dans le corps. 

En nutrition, les protéines sont digérées, découpées dans le tractus gastro intestinal, pour en récupérer les acides aminés. Ce sont ces acides aminés, précisément, qui seront directement impliqués en post-entraînement dans les métabolismes de réparation, recherchés en musculation ou en sports d’endurance.

Lorsqu’on chauffe, on dénature ; lorsqu’on filtre, on peut dénaturer ; lorsqu’on reconstitue dans un liquide, on dénature ; lorsqu’on digère, on dénature… Une étude1 montre même qu’homogénéiser du lait entier dénature les protéines.

Or, sur une whey native, le lait peut avoir été pasteurisé (traitement supérieur à 70° sur plusieurs minutes) avant d’être filtré (mécaniquement, sur colonne). Le séchage peut être réalisé à chaud, avec préchauffage, puis la poudre peut être formulée avec des additifs ou d’autres ingrédients : autant de process sources de potentielles dénaturations des protéines. Une whey « native » peut donc être totalement plus dénaturée qu’une whey classique dite « fromagère » !

En conclusion, même si cela est moins crucial qu’en médecine, on cherchera, de préférence, des protéines les moins dénaturées possible. Cela étant dit, il y a tellement d’étapes pendant lesquelles la poudre de whey va être impactée suivant la qualité du process (production de lait, stockage, pasteurisation, filtration, formulation du produit fini…) que l’étape d’ajout de présure ou de ferments est absolument dérisoire pour en faire un critère de qualité ou même de prix par rapport à une whey native.

La whey dite « fromagère » est-elle un déchet de l’industrie du fromage ?

Dans le monde de la nutrition sportive, où le marketing est roi, ce mot « déchet » est repris allègrement par les industriels de la native. Un déchet est une substance de bas prix, impropre à la consommation, inutilisable, de piètre qualité et destiné à être détruite. Réduire des protéines de lactosérum, la substance naturellement la plus riche en acides aminés essentiels et en BCAA par gramme de protéines, à un déchet semble, à notre avis, plutôt inadapté.

En vérité, le lactosérum issu de la fabrication du fromage, le « petit-lait », a toujours été utilisé et même directement bu par les habitants des villages de montagne pour lutter contre la rudesse du climat, ou utilisé dans des préparations comme le sérac. 

Cela dit, composé à plus de 90% d’eau, le petit lait représente de gros volumes, et n’était donc pas, techniquement, utilisable à grande échelle, jusqu’aux derniers progrès technologiques. 

C’est donc relativement récemment que le lactosérum a pu être technologiquement valorisé et peut être utilisé dans des produits de très haute qualité, en nutrition, avec différents goûts, dans le sport comme dans le médical.

Rassurez-vous, le petit lait n’est pas une substance secondaire, récupérée dans des sceaux à la fin de la fabrication du fromage… C’est aujourd’hui, véritablement, un produit ultra-valorisé, parfois plus encore que le fromage qui est fabriqué en parallèle. 

« La whey native ne contient pas de GMP ! »

Autre argument avancé par les fabricants de native, la présence de GMP (glycomacropeptides) dans les wheys classiques, formés lors de l’ajout de présure ou de ferments.

Ces GMP ont été avancés comme délétères à la santé du consommateur, à la suite d’une publication d’une étude en 2001. Cette étude2 apparaît aujourd’hui comme totalement inadaptée et dénuée de sens pour les adultes, puisqu’elle s’appuyait sur les effets de la prise de GMP sur le système digestif de nourrissons prématurés…

On sait, bien entendu, que le système digestif des nourrissons prématurés est très particulier et qu’une multitude de substances bénéfiques à un adulte serait potentiellement dangereuse pour ces derniers. 

Heureusement, de nouvelles études3, plus récentes, montrent que les GMP sont en réalité totalement sûrs, et même très bénéfiques à plusieurs points de vue, comme sur la régulation des systèmes gastro intestinaux, endocriniens et même immunitaires. 

Pour conclure, dire qu’une whey native est directement issue du lait, sans étape de coagulation de la caséine, est totalement juste et honnête. En revanche, s’appuyer sur cela et sur ce terme pour argumenter de la qualité de la protéine en poudre, et du coté « naturel » et non transformé, l’est beaucoup moins. Le terme de natif n’est en fait qu’un argument marketing de plus, dans le monde de la nutrition sportive ou malheureusement, l’image et le marketing sont les éléments les plus importants. 

Pour vous assurer d’une whey de qualité, la moins transformée possible et la moins dénaturée, concentrez-vous plutôt sur l’origine du lait (agriculture intensive, localisation (France, étranger…), appartenance à un grand groupe laitier…). La qualité des protéines en sera directement liée. Privilégiez les wheys qui font intervenir des process adaptés, sans chaleur (pasteurisation douce, pas de préchauffage avant séchage en atomisation…). N’hésitez pas à demander aux marques des informations à ce niveau. 

Enfin, privilégiez des wheys made in France, contenant peu d’ingrédients, sans additifs ni édulcorants, avec des goûts naturels.

Évitez à tout prix les saveurs chimiques, et très sucrées. On oublie souvent cet aspect lorsqu’on parle de dénaturation, mais les additifs, après reconstitution du mélange dans le shaker, outre leurs effets négatifs sur la santé, sont une source majeure de dénaturation des protéines.

Si les wheys que vous consommez en post-entraînement contiennent des glucides, concentrez vous également sur la qualité et la traçabilité de ces derniers. Consultez notre article sur l’importance des glucides avec les protéines.

De la qualité de vos produits de nutrition dépendra directement votre récupération musculaire et votre santé au long terme.

A voir également :

Sources

1Effect of homogenization and pasteurization on the structure and stability of whey protein in milk par
2An infant formula free of glycomacropeptide prevents hyperthreoninemia in formula-fed preterm infants par
3Glycomacropeptide Bioactivity and Health: A Review Highlighting Action Mechanisms and Signaling Pathways par

Un article écrit par

Aymeric Mendez & Guillaume Lavastre

Guillaume et Aymeric sont les fondateurs de Protéalpes. Ils sont également des pharmaciens, passionnés de nutrition et de sport.

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