Faire du sport avec des courbatures est possible et peut même être bénéfique, à condition d’adapter intelligemment son activité physique. Mais attention : + de douleur ne signifie pas + de muscle !
Les sensations musculaires douloureuses post-entraînement nous font parfois douter de notre capacité à performer ou à récupérer. Pourtant, des études récentes montrent que, non seulement il est possible de s’entraîner avec des courbatures, mais que cela peut même accélérer la récupération, à condition de ne pas confondre effort et destruction musculaire excessive.
Qu’est-ce qu’une courbature exactement ?
Avant de parler d’entraînement avec des courbatures, examinons ce phénomène appelé “Delayed Onset Muscle Soreness” (DOMS) ou douleur musculaire d’apparition retardée en français.
Les courbatures apparaissent 24 à 48 heures après l’activité sportive et ne sont pas, contrairement aux idées reçues, liées à la sécrétion de lactate pendant l’effort physique.
Il s’agit en réalité de micro-lésions des fibres musculaires. Le temps de récupération d’un muscle dépend du sportif, de l’intensité et de la durée de sa séance de sport, mais aussi de son hygiène de vie pendant la phase de récupération.
🔬 Attention à la confusion lactate et courbatures !
Pendant longtemps, on a cru que l’acide lactique était responsable des courbatures. C’est une erreur qui persiste encore aujourd’hui !
– le lactate (et non l’acide lactique) est un produit naturel du métabolisme énergétique ;
– il est rapidement éliminé après l’effort et sert de carburant pour d’autres cellules.
Les courbatures sont uniquement dues aux micro-lésions musculaires causées par les contractions excentriques et au processus inflammatoire qui s’en suit.
Comment se forment ces micro-lésions ? Principalement lors d’un travail excentrique, c’est-à-dire quand le muscle s’allonge tout en se contractant, généralement pour freiner un mouvement.
Par exemple lors d’une descente en course à pied : vos quadriceps freinent activement la descente, créant ces micro-traumatismes.
Les exercices en excentriques causent en effet plus de micro-déchirures dans le muscle. Cela dit, des contractions concentriques peuvent aussi provoquer des courbatures si l’effort est inhabituel ou très intense, mais en général leur impact est moindre.
Si la nuance n’est pas parfaitement claire pour vous, voici un petit tableau :
Groupe musculaire | Effort concentrique | Effort excentrique |
---|---|---|
Biceps brachial | Curl biceps (phase de montée) | Curl biceps (phase de descente contrôlée) |
Triceps | Extension à la poulie (poussée) | Extension à la poulie (retour contrôlé) |
Quadriceps | Squat (phase de remontée) | Squat (descente lente) |
Ischio-jambiers | Leg curl (contraction active) | Leg curl (phase de redescente) |
Pectoraux | Développé couché (poussée) | Développé couché (descente contrôlée) |
Dos (grand dorsal) | Tractions (phase de montée) | Tractions (descente contrôlée) |
Deltoïdes antérieurs | Développé militaire (poussée) | Développé militaire (descente lente) |
Mollets | Élévation sur la pointe des pieds (montée) | Descente sur talons (phase contrôlée) |
Abdominaux | Crunch (contraction active) | Crunch inversé (redescente contrôlée) |
Fessiers | Hip thrust (poussée) | Hip thrust (phase de descente) |
Adducteurs | Adduction à la machine (contraction) | Adduction (retour lent et contrôlé) |
Abducteurs | Abduction à la machine (contraction) | Abduction (phase de retour) |
Épaules latérales | Élévation latérale (montée) | Élévation latérale (descente lente) |
Épaules postérieures | Reverse fly (contraction) | Reverse fly (phase de descente contrôlée) |
Avant-bras | Flexion des poignets (contraction active) | Flexion des poignets (descente contrôlée) |
Obliques | Rotation avec câble (contraction active) | Rotation négative (retour contrôlé) |
Dos (rowing) | Rowing à la barre (tirage actif) | Rowing à la barre (phase de descente) |
Pectoraux (variant) | Pec Deck (contraction) | Pec Deck (retour lent) |
Quadriceps (variant) | Fente avant (phase de montée) | Fente avant (descente contrôlée) |
Ischio-jambiers (variant) | Soulevé de terre jambes tendues (remontée) | Soulevé de terre jambes tendues (descente contrôlée) |
Comment fonctionne la reconstruction musculaire ?
- Micro-lésions des fibres musculaires : lors d’un entraînement, surtout avec des charges lourdes ou des mouvements excentriques (freinage musculaire), les fibres musculaires subissent des micro-déchirures à l’origine de la sensation de douleur associée aux courbatures.
- Réaction inflammatoire et réparation : le corps déclenche une réaction inflammatoire pour réparer ces dommages. Cela entraîne une augmentation du flux sanguin et un afflux de nutriments essentiels (protéines, acides aminés, etc.).
- Synthèse des protéines musculaires : le corps reconstruit les fibres endommagées en ajoutant plus de protéines contractiles (actine et myosine). Cela entraîne un épaississement des fibres et une amélioration de leur capacité à générer de la force.
- Hypertrophie musculaire : avec une répétition régulière de ce cycle (entraînement + récupération), les muscles deviennent progressivement plus épais et plus forts pour mieux supporter les futures sollicitations.
Plus de dommages ne signifie pas plus de muscle !
Un excès de micro-lésions peut ralentir la récupération et empêcher l’entraînement fréquent, ce qui freine la progression.
Une alimentation insuffisante en protéines et calories peut limiter la capacité du corps à reconstruire efficacement le muscle. Nous y revenons dans notre dossier sur la carence en protéines.
Ainsi la réparation musculaire implique une reconstruction plus épaisse des fibres, mais elle doit être progressive et bien dosée. La croissance musculaire ne dépend pas uniquement des courbatures, mais plutôt de la surcharge progressive, de la nutrition et de la récupération.
Voyons maintenant comment le sport peut influencer ces douleurs musculaires.

Quels sont les effets du sport sur les courbatures ?
Quels sont les bienfaits d’une récupération active ?
Les recherches démontrent que la récupération active peut aider le processus de réparation musculaire via :
- l’amélioration du flux sanguin vers les muscles endoloris ;
- l’élimination plus rapide des déchets métaboliques ;
- la réduction de la sensation de raideur ;
- le transport optimisé des nutriments nécessaires à la reconstruction musculaire.
Une revue systématique de 2018 publiée dans le Frontiers in Physiology1 fait le point sur les études évaluant l’impact des techniques de récupération sur les courbatures d’apparition différée (DOMS), la fatigue perçue, les dommages musculaires et les marqueurs inflammatoires après un exercice physique.
Les changements dans les concentrations sanguines des marqueurs de dommages musculaires comme la créatine kinase et des biomarqueurs inflammatoires (protéine C-réactive et interleukine-6) observés après l’exercice peuvent servir à évaluer la récupération musculaire.
Selon cette analyse, la récupération active a un effet positif sur la récupération musculaire seulement sur une courte période post-exercice, avec un effet similaire à la thérapie par contraste (alternance bain chaud/ bain froid).
En bref, une activité modérée de courte durée stimule la circulation sanguine et accélère la réparation musculaire, mais un entraînement trop intense pourrait créer de nouvelles micro-lésions et retarder le processus de récupération. C’est au sportif de trouver un juste milieu !
Une récupération active pour les sportifs en phase de prise de masse peut accélérer la réparation sans compromettre les gains musculaires si elle est combinée avec un apport protéique suffisant !
Qu’en est-il des autres techniques de récupération ?
Une revue de 2021 publiée dans le journal Physical Therapy in Sports2a examiné 121 études évaluant l’impact de différentes techniques de récupération sur les courbatures (DOMS).
Voici les résultats des techniques ayant un impact positif sur la récupération musculaire :
Technique de récupération | Efficacité (valeur p) | Variabilité (I²) |
---|---|---|
Massage | p<0,00001 | 94% |
Photothérapie | p=0,0001 | 95% |
Exercice actif | p=0,0004 | 93% |
Vibration | p=0,004 | 96% |
Cryothérapie | p=0,002 | 100% |
Techniques de contraste | p=0,002 | 60% |
Compression | p=0,002 | 93% |
Ultrasons | p=0,02 | 97% |
💡 Plus la valeur p est proche de 0, plus le résultat est statistiquement fiable. Le I² élevé indique une grande variabilité entre les études.
Qu’est-ce que ça signifie concrètement ?
Toutes ces techniques semblent aider à réduire les courbatures, avec une efficacité particulièrement marquée pour le massage. Cependant, la qualité globale des preuves est considérée comme “faible”, ce qui signifie qu’il faut interpréter ces résultats avec prudence et que d’autres études sont nécessaires pour confirmer ces effets.
Pour rappel : ces techniques accélèrent la réparation SI votre corps a les moyens de se réparer. Un apport adapté en protéines est essentiel pour la réparation des fibres musculaires !
A l’inverse les données scientifiques ne montrent aucun effet statistiquement significatif pour :
- le kinesio-taping ;
- l’acupuncture ;
- le foam roller (rouleau de massage) ;
- les étirements ;
- l’électrostimulation ;
- la thérapie magnétique.
Cela ne signifie pas que ces techniques sont totalement inutiles (elles peuvent avoir d’autres bénéfices) mais, simplement, qu’elles n’ont pas démontré d’avantage réel par rapport à l’absence de traitement pour soulager les courbatures.

Comment optimiser sa récupération ?
La récupération musculaire repose sur 3 principes de base : nutrition, hydratation et sommeil. Les autres techniques comme la récupération active ou le massage peuvent venir en complément, mais ne remplaceront pas ces fondamentaux pour réparer les micro-lésions musculaires, reconstituer les réserves énergétiques et prévenir les risques de blessures.
L’alimentation post-effort doit être particulièrement riche en protéines pour fournir les ressources nécessaires à la reconstruction des fibres musculaires. Les glucides sont également essentiels pour reconstituer les réserves énergétiques. Les acides gras oméga-3, présents dans certaines huiles et dans les poissons gras notamment, contribuent à réduire l’inflammation et les vitamines et minéraux antioxydants soutiennent le système immunitaire.
Et la whey ?
Les protéines de lactosérum, ou whey, sont intéressantes pour la récupération musculaire car elles sont riches en acides aminés essentiels (BCAA). Consommées après l’effort, elles stimulent la synthèse protéique musculaire, favorisent la réparation des micro-lésions et le développement de la masse musculaire.
Certains aliments peuvent, en revanche, entraver la récupération. Par exemple, l’alcool perturbe la synthèse protéique et le sommeil tout en déshydratant l’organisme. Les aliments ultra-transformés, souvent riches en graisses saturées et sucres raffinés, favorisent quant à eux l’inflammation.
Le sommeil constitue un moment privilégié pour la récupération. C’est pendant cette phase que le corps sécrète les hormones anabolisantes essentielles à la reconstruction musculaire. Les athlètes devraient viser 7 à 9 heures de sommeil quotidien, voire davantage lors des périodes d’entraînement intense. Un manque de sommeil chronique peut, au contraire, augmenter le catabolisme musculaire via la production de cortisol. A ce sujet, prendre des protéines avant de dormir ne nuit pas au sommeil et favorise la récupération nocturne.
Maintenir une bonne hydratation avant, pendant et après l’effort permet le transport des nutriments et l’élimination des déchets métaboliques tout en compensant les pertes en eau et en électrolytes liées à la transpiration.
Conclusion
Les courbatures n’empêchent pas de poursuivre une activité physique. Une récupération active légère peut même s’avérer bénéfique, à condition d’adapter l’intensité de sa séance de sport.
Une bonne récupération repose sur un sommeil de qualité, une hydratation suffisante et une bonne nutrition. En phase de récupération, les protéines, en particulier, permettent la réparation des fibres musculaires endommagées.
Gardez à l’esprit que chaque personne réagit différemment aux courbatures. Ce qui compte avant tout est d’apprendre à écouter les signaux de votre corps et d’adapter votre séance en conséquence !